« Il y a quarante ans je me souviens : de mes élèves, de mes cours de français, du petit lycée où j’enseignais et de l’odeur de la craie… Mais de cet appel il y a une demi-heure, je ne me souviens plus, où s’est-il perdu ?
Je dois apprendre à mentir pour ne pas paraître idiote, et excuser ma mémoire. Soudain, j’ai peur du noir que ces absences sont en train d’installer dans ma tête et dans mon cœur… Allez Ella, secoue-toi, c’est juste passager, tu verras ! »
L’univers d’Ella, 78 printemps, bascule le jour où elle se voit diagnostiquer la maladie d’Alzheimer. Entre espièglerie et désespoir, elle chronique toutes les étapes de sa déchéance, des premiers trous de mémoire au grand oubli final.
Pour Ella et ses proches commence une nouvelle vie parsemée de sentiments et de peurs à apprivoiser, car c’est tout le quotidien qui est à réinventer. Leur existence se fait dorénavant au diapason des visites médicales, des démarches administratives, de ses amnésies, mais aussi des souvenirs, des belles rencontres et de l’amour des siens. Progressivement mêlée de quiétude, sa plume lui permet d’exprimer son vécu et d’exister au présent : cette vie qui lui échappe ne sera pas gommée.
Exerçant dans le domaine de la maladie d’Alzheimer et des démences apparentées, Nathalie Dulac s’occupe de personnes âgées dépendantes. Son intérêt pour ces pathologies est né d'une rencontre avec le père d'une de ses amies atteint de cette maladie, et de la relation d'amour aidant-aidé dont elle a été témoin. L'amour, un vaste sujet auquel sa plume délicieusement unique rend hommage à travers ses écrits.
Un tourbillon qui décompose, une pathologie qui gomme peu à peu, une évaporation mentale… Qui devient-on, lorsque l’on est atteint d’Alzheimer ? Que reste-il ? Aussi incisive que facétieuse, la plume de Nathalie Dulac a cette gravité confondante de ceux qui touchent du doigt l’essentiel. Elle nous rappelle, surtout, que derrière un malade il y a une personne : ne l’oublions pas.