Thème : Témoignages

Une vie sans histoire

« La maison était pleine d’enfants de tout âge. Nous avons vite compris que nous y resterions et que nous n’étions pas ici pour passer les vacances, même si on nous avait dit le contraire, comme ce fut à chaque fois le cas lorsque nous nous faisions déplacer de famille en famille. »

D’une enfance émouvante passée sur le continent africain à une adolescence et une vie d’adulte turbulentes sur le sol européen, les pierres d’achoppement étaient multiples pour l’auteur de ce récit. Il relate ces trente années où il a rencontré le meilleur et le plus triste, et décidé que tolérance et respect seraient au cœur de son éthique personnelle.

Anne recherche Colette

« Je n’ai pas de courage. Je ne pousse pas à bout mon entourage pour savoir jusqu’où il m’aime. J’ai trop besoin de leur amour. Je suis Anne, fille liane. J’entoure, j’enserre. Je m’étends, je me fau- file, je m’enroule, je m’accroche. À leurs bras, à leurs jambes, à leurs cous. Tout est prétexte. »

Bébé, Colette est adoptée et devient Anne. Un jour, elle cherche à assembler les pièces du puzzle de ses racines. Quête de ses origines, mais également quête de soi. Elle s’exprime tantôt avec la voix d’Anne, tantôt avec celle de Colette. Pour retrouver cette petite fille dont l’état civil lui a échappé des années auparavant. Pour faciliter la réconciliation de ses identités familiales. Au commencement de son périple sur le chemin de son histoire, elle est loin d’imaginer ce qui l’attend…

Merveilleux

« Faisons ce qui est à la portée de tout un chacun : vivre ensemble avec des rêves. Ces rêves qui sont facteurs d’évolution de notre condition. Ce sont parfois des rencontres, des situations, qui nous permettent de réaliser nos rêves et ainsi d’évoluer et de changer de rang social. »

Se jouant de la frontière entre le réel et l’imaginaire, l’auteur retrace à grands traits son parcours. Il s’appuie également sur ses rêves et ses prémonitions pour décrire notre environnement en pleine mutation et dire ses espoirs.

Les élagueurs

« Et subitement tout a changé, le ciel nous est tombé sur la tête, faut le voir pour le croire, c’est presque la nuit, les réverbères se sont allumés, éclairant le sol devenu tout blanc. Un fracas ouaté me donne l’impression d’avoir encore mon casque antibruit sur les oreilles, alors que je ne l’ai plus. J’ai deux centimètres de neige sur mes vêtements, ma longe et ma corde ont gelé. Il neige de gros flocons bien gras, il neige comme pour rendre cette jour- née encore plus ardue »

Une tempête d’hiver et des arbres s’abattent. Un groupe d’élagueurs doit intervenir en urgence pour ramasser les géants tombés au sol ou sur des bâtiments. Un défi que sont prêts à relever ces hommes, malgré l’épuisement et le danger. Dans cette journée à ciel ouvert, chacun ira au-devant de sa vérité, quitte à frôler la chute.

En cavale grâce au juge

« À partir de janvier 2011, je vais pouvoir aller voir mon mari très souvent au Maroc, et c’est ainsi que commence pour moi une belle aventure, une aventure qui va durer trois ans, trois ans d’une cavale au cours de laquelle je vais découvrir un pays magnifique avec des paysages époustouflants. Je vais aller à la rencontre du peuple marocain qui est le peuple le plus généreux et le plus hospitalier de la terre. »

Lorsque son époux est mis en examen, France Colle-Caugy voit son monde s’écrouler. Garde à vue, détention provisoire et convocations se succèdent jusqu’à ce que le juge d’instruction accorde une autorisation de sortie du territoire de 3 jours pour raisons professionnelles.
Faute d’accord judiciaire entre le Maroc et la France, le séjour durera en réalité 3 années. Une parenthèse dans le royaume chérifien que l’auteure relate avec toute l’immense tendresse qu’elle porte à son pays de cœur.

Pas comme les autres

« J’ai le souvenir que je me levais toujours avant les autres pour commencer par manger « mon petit déjeuner en mode contrôlé », puis je continuais avec eux, au fur et à mesure que les membres de la famille se levaient. Et là, je mangeais comme eux : gâteaux et tout ce que je ne mangeais pas lorsque j’étais seule. Le petit déjeuner pouvait alors durer presque deux heures. Je mangeais très doucement, donc je n’avais pas trop de lourdeurs dans l’estomac. »

À l’adolescence, la confrontation au regard des autres peut se révéler dévastatrice. Ce récit en est le témoignage, celui d’un quotidien vicié par une colocataire envahissante : l’Anorexie. Lorsqu’être mal dans sa peau devient synonyme de vouloir se faire la peau, alors il faut s’accrocher à toutes les planches de salut. Ou au moins, accepter de ne pas être la personne parfaite, la collègue impeccable, l’amoureuse fantasmée.

Il y a quelqu’un qui t’aime en France

« Après six mois d’attente, il annonce enfin son retour à Corato pour quelques jours et lui promet une rencontre. En même temps, il a écrit à la signora Di Carolis pour la prévenir de sa visite et lui demander l’autorisation de voir Nicolete, en l’assurant de l’honnêteté de sa démarche. Les retrouvailles ont lieu dans le salon de la villa, en présence de la signora dans le rôle de la duègne, qu’elle n’apprécie guère, mais qu’elle se doit d’interpréter pour le respect des convenances. Intimidés et quelque peu déçus de ne pouvoir se retrouver seuls, les deux tourtereaux se limitent aux banalités d’usage exprimées en phrases polies. »

1916, l’Italie est en guerre. À Corato, province des Pouilles, Domenico vient au monde, alors que son père meurt sur le front du Trentin. Trois ans après, sa mère succombe à la pandémie de grippe espagnole. Recueilli par son oncle, l’orphelin grandit dans un monde d’agitation politique menant les fascistes au pouvoir. À l’aube de la seconde guerre mondiale, Domenico épouse Nicolete, vendue à huit ans à une famille aristocratique pour s’occuper d’une fillette handicapée. Lui, bientôt père, veut connaître son enfant et refuse la mobilisation. Arrêté, il échappe in extremis à la mort, grâce à l’aide providentielle des Résistants. La paix revenue, mais la misère persistant, il choisit de s’expatrier. Une tireuse de cartes avait prédit à Nicolete un départ pour la France…Témoignage d’une époque qui a vu le sol italien dévasté par la pauvreté, les conflits et l’exil de ses fils, « Il y a quelqu’un qui t’aime en France » évoque l’intimité des gens du peuple à travers deux destins singuliers.

Les moutons à deux pattes

« La maman reçoit une lettre de l’Assistance publique qui annonce que je vais être déplacée, c’est la catastrophe. Je ne crois pas qu’elle puisse s’y opposer. Pour l’Assistance publique, je ne suis qu’un pion. Pourtant je suis bien inté- grée dans le village et cette ferme, ce coin de campagne, j’en connais chaque recoin, chaque caillou sur le chemin, chaque buisson, chaque arbre. J’adore les arbres. Je crois aussi que la maman m’aime. »

Placée très jeune en famille d’accueil, Mireille Cotte a longtemps tout ignoré de ses racines. Aujourd’hui, à 85 ans, elle raconte son enfance marquée par les séparations, les silences et les petits miracles qui permettent de tenir jour après jour.
Elle, qui a grandi avec le sentiment d’être exclue de la société, a fait son chemin jusqu’à fonder sa propre famille.

Elle

« La psychologue est venue, elle avait de grands yeux bleus très doux, une voix posée, elle restait à distance, assise au fond de la chambre. Ça m’allait bien, moi, je pouvais m’appuyer dos au mur, genoux sous le menton. J’ai beaucoup pleuré, peu parlé, je n’y arrivais pas, les mots ne correspondaient à rien, ne voulaient rien dire, n’étaient pas assez forts, assez justes, alors je pleurais.
« Ça va aller, on se revoit demain. » »

Elle, de son pronom-prénom, reste souvent là, à regarder le fleuve couler. Recroquevillée sur elle-même contre ce petit muret. Elle essaie de laisser partir ses souvenirs tenaces dans le courant, mais ils s’accrochent. Ce ne sont pourtant que des souvenirs, car aujourd’hui elle est entourée. Elle a trouvé ses pairs, est rassurée… Un bel hommage à la différence, à l’amitié et aux autres visions de l’existence.

Des deux côtés de la frontière

« J’ai quitté l’Allemagne, un matin, très tôt. Je me suis retourné une dernière fois sur les murs de ce camp où je venais de passer ces deux dernières années, ces murs qui m’avaient évité un sort plus funeste que celui de travailleur forcé. J’emportais ce passé, plein d’espoir en l’avenir. J’ai repris mon chemin pour retrouver ma famille, du côté français. »

8 mai 1945, l’Armistice, mais pas la fin de toutes les hostilités. Il demeure des rancœurs bien ancrées dans les mentalités de l’après-guerre. Dans les décombres, la haine des Boches et la fatalité vont indéniablement séparer une famille. Le non-dit durera 70 ans.
Ce récit s’inspire de faits réels, de ceux qui traversent en sourdine les générations pour rejaillir avec fracas des décennies plus tard. Il y est question d’un petit garçon né en Allemagne, d’un père revenu du STO et à qui on a intimé l’ordre de garder le silence sur cet enfant.

Deux vies parallèles reliées par le sang

« Car lors de la naissance, il y a toujours une personne qui dit : « Oh ! Il a tes yeux, il a ton nez. » Ça pouvait paraître anodin pour les gens, mais pour moi, ça me rappelait que je ne ressemblais pas à Yvette, ma mère adoptive (elle est blonde aux yeux verts alors que je suis brune aux yeux marron). »

C’est le récit poignant d’une jeune femme adoptée et de sa quête pour retrouver ses parents biologiques. Elle évoque avec sincérité les obstacles et les doutes auxquels elle doit faire face. Parce qu’aller à la rencontre de ses géniteurs, jeter un pont entre deux existences qui ont longtemps avancé sans se croiser, c’est bouleverser toutes ses certitudes et ses ancrages.

Les dérives du système de la protection de l’enfance

« Mon histoire n’a pas pour objectif de faire pleurer dans les chaumières, mais d’alerter les députés, les sénateurs, le président, les ministres, que notre système va mal. J’ai écrit à de nombreuses personnes influentes : ministre de la Justice, IGAS, médiateur de la République, secrétaire d’État et Première dame de la République. »

La tragédie vécue par une mère et qui pourrait être celle de tant d’autres parents. C’est ce que raconte l’auteure, elle dont la fille a été placée en foyer éducatif il y a plusieurs mois. Un placement décidé de manière expéditive sur la base de rapports orientés et infondés alors que la loi prévoit des alternatives.
Cette maman raconte son combat pour retrouver son enfant. Elle souligne, preuves à l’appui, l’acharnement des services sociaux et la partialité de certains professionnels, juges, pédopsychiatres.

Pute et soumise

« Alors je me suis mise à lui expliquer la loi du trottoir, moi on me respectait déjà, car j’étais devenue une dure, à force. Nous avons travaillé ensemble, parlons en ce terme, travail. »

Lorsque ses parents se séparent, violemment, la vie d’une jeune fille bascule. Elle grandit sous les coups et les brimades avant d’être mise à la porte de son domicile, à sa majorité. Commence alors l’enfer de la rue, cette fois sous l’emprise d’un proxénète.
Comment dire l’impensable, la honte et la peur et retrouver le respect de soi-même ? C’est un long chemin à parcourir, de l’ombre vers la lumière, du regard des autres à l’amour de soi.

Pour une autre humanité

L’état psychique dans lequel inconsciemment je me trouvais avait dû contaminer mes interlocuteurs, car nous sommes restés à en débattre jusqu’à une heure avancée de la nuit, et plus le temps passait, plus j’étais envahi par une excitation cérébrale extraordinaire qui, trois jours durant, ne m’a pas quitté, m’empêchant de dormir sans pour autant que j’en ressente de la fatigue. J’ai vécu cette nuit-là, dans l’ambiance d’une aube nouvelle pour le monde ou pour l’humanité, quelque chose qui n’était jamais arrivé. Quoi ? Je n’en savais encore rien. »

Avoir, être, aimer et faire, les quatre verbes qui, selon l’auteur, peuvent résumer les points cardinaux de la vie humaine. Il nous incite pourtant à les dépasser, à les sublimer en quête de l’essentiel : retrouver une harmonie entre les êtres et leur environnement.

La Banalisation du mal

« Tout Kigali était en proie à des massacres.
Pourtant, il devait y avoir un ou deux réticents. Quelqu’un m’expliqua un jour que chaque récalcitrant était pris à part et qu’en partageant une bouteille de Primus, on leur expliquait l’importance et la nécessité des opérations. La façon de gérer un réticent, m’a-t-on dit, était de fournir plus de bière, de sélectionner un Tutsi et de lui ordonner de le tuer. En général, m’a dit mon informateur, cela faisait l’affaire. Et s’il y avait un insoumis qui refusait encore ? Celui qui se tenait systématiquement sur le côté lorsque les meurtres avaient lieu ? Une telle personne, m’a-t-on expliqué, était dangereuse pour la cohésion du groupe et devait servir d’exemple. »

Concentré sur des histoires individuelles, le récit de Charles Petrie rappelle combien la terreur peut être rapidement déclenchée. Lorsque le libre arbitre de quelques-uns cède, alors la bête immonde fait son entrée dévastatrice.

Une ombre dans le tableau

« J’ai l’âge de caresser mes rêves du bout des doigts et de voir mes illusions se transformer en espoir.
J’ai l’âge où l’amour est parfois une flamme qui a besoin de se consumer dans le feu d’une passion désirée, parfois un havre de paix, tel un coucher de soleil sur la mer.
J’ai quel âge ?
Je n’ai pas besoin de nombre, car mes désirs réalisés, les larmes que j’ai versées en voyant mes illusions se briser… valent beaucoup plus que ça. »

« Nous ne pouvons rien changer à notre passé, faire que les dommages qui nous ont été infligés dans notre enfance n’aient pas eu lieu. Mais nous pouvons nous changer, nous « réparer », regagner notre intégrité perdue. »
Ainsi commence le récit de Mélinda Sand. Depuis le promontoire des épreuves passées, elle observe l’agitation vaine, les faux-semblants qui l’ont autrefois marquée et qui aujourd’hui se détachent d’elle. Avec une lucidité douloureuse mais indispensable, elle évoque son parcours, les atteintes dont elle fut victime et le long chemin qu’elle a parcouru depuis vers sa lumière.

Ram’Adam

« J’ai honte de mes pensées. Nos amis nous parlent d’un acte héroïque. Pour nous, ce n’est qu’un acte juste, un besoin de leur venir en aide, essayer de combler, pour un seul, le vide humanitaire immense dont on a honte. »

Si l’on parle beaucoup des migrants comme d’un problème, peu de personnes, en réalité, agissent concrètement pour leur venir en aide. L’auteure nous fait ici le récit de l’accueil d’Adam, un jeune Soudanais, dans sa famille. Ne cachant ni les difficultés du parcours, ni les joies intenses, elle se livre à cœur ouvert pour conter une aventure avant tout humaine.

Enfance violée, vie brisée

« Évidemment, elle faisait profil bas dans les premiers temps, mais cela n’a pas duré très longtemps. En effet, quinze jours après cela, elle me mettait à l’écart de mon père, elle m’envoyait à droite à gauche, il fallait que je sois à ses ordres. »

Dans cet ouvrage autobiographique, l’auteure confesse une enfance brisée par des violences physiques et psychologiques au sein de sa famille. La douleur l’a poursuivie jusqu’à l’âge adulte, où elle a enfin rencontré la personne qui l’a aidée à quitter ce cycle infernal de malheur.

Mes incroyables guérisons

« Je sentais que je flottais dans l’air près du plafond et je me promenais dans la chambre, dans le hall et dans la cuisine ! Je n’étais pas un fantôme ! Je savais que j’étais souvent à l’intérieur d’une bulle qui semblait être faite d’une sorte de vapeur. »

À trois reprises, l’auteure a échappé à la mort. Trois moments qui lui ont rappelé la fragilité de la vie. Elle raconte les faits tels qu’ils se sont déroulés, partage les sensations et les sentiments ressentis alors. Elle propose également ses réflexions après son expérience de mort imminente (EMI). Un ouvrage qui ouvre des portes autant spirituelles que psychologiques à qui veut entrevoir la lumière.

Le sel de nos vies

« En quelques semaines, je décide avec Sarah de mettre en place un projet sportif, qui soit aussi une action solidaire de  tous  ceux  qui  mènent  le  combat  contre  la  mucoviscidose. Ensemble, nous souhaitions que ce projet soit plus qu’une aventure familiale. Ce devait être un défi qui nous porterait plus loin que nos petites personnes, notre cocon nucléaire ! »

Rejoindre à vélo le Centre de Ressources et de Compétences de la Mucoviscidose de Roscoff dans le Finistère depuis Carry-le-Rouet dans les Bouches-du-Rhône, soit un périple de 1 500 km, c’est le défi un peu fou qu’Emmanuel de Calan a relevé en 2021.
Tout à la fois récit de voyages, recueil de témoignages et d’informations médicales, « Le sel de nos vies » touche du doigt ce qui rend belles nos existences, malgré les doutes, malgré les blessures.